Confinements : Tops & Flops des marques selon le cabinet Adequation MR

Lors des confinements, les gens ont eu un temps de cerveau disponible record pour Coca Cola et ses confrères. Certaines marques se sont tues ou ont répété les messages antérieurs, d’autres ont su créer un lien particulier. C’est ce que Elisabeth Martine-Cosnefroy du cabinet ADEQUATION a analysé et nous raconte.

Pourquoi et comment as-tu réalisé cette étude quanti ?

D’abord pour aider les annonceurs à comprendre ce qui a touché ou choqué les consommateurs et établir un schéma des codes de communication adapté à une situation de crise.  L’idée Top et Flop est venue des vives critiques essuyées par La Poste suite à sa décision de fermer brutalement ses bureaux sans aucune explication. Nous avons ainsi interrogé un échantillon représentatif des Français de plus de 18 ans à la fin du premier confinement avec une question ouverte très simple : quelles sont les communications qui vous ont choquées ou touchées ? 

Ensuite, nous avons analysé le contenu de manière artisanale pour nous prouver que cette méthode était aussi économique et rapide qu’avec du machine learning. 

 

Quelles sont tes premières conclusions ?

Les consommateurs ont répondu en nombre indépendamment de leur âge ou CSP et ont un véritable besoin de raconter leurs expériences : ils ont cité 258 marques différentes ce qui est énorme et ont fourni des réponses très complètes.

 

Quelles attentes se dégagent ? Comment les as-tu structurées ?

Tout d’abord, la posture de départ joue un rôle clé : les individus sont-ils plutôt confiants ou défiants vis-à-vis d’un univers ou d’une marque. Par exemple on a tendance à être méfiant envers les banques alors qu’on est en phase avec Decathlon.

Ensuite, il y a des marques qui relèvent de la nécessité, comme la SNCF, et d’autre qui relèvent plutôt de l’agrément, du plaisir, c’est le cas des cosmétiques. Nous avons ainsi créé un tableau avec la position sectorielle de chaque marque selon deux axes : affinitaire (affinité-proximité / défiance-distance) et fonctionnelle (nécessité / agrément).

Dans une période de crise sanitaire, les marques de services aux publiques (eau, gaz, télécom, transport, etc.), ont pour obligation d’être dans l’action et non dans la parole. Il aurait été malvenu qu’Amazon, dans une position de force accrue, fasse de la publicité pour la rapidité de sa livraison. Dans le même temps, le Crédit Agricole a communiqué avec finesse et humilité en portant un discours de reconnaissance envers les soignants et d’autres acteurs prenant des risques pour le grand public (éleveurs, éboueurs…). Le spot présente à la fin leurs collaborateurs qui ont continué d’accueillir le public en agence. Le faire dans l’ordre inverse aurait été critiqué mais là, ils ont su rester présents sans en faire trop. Cette communication a été très appréciée et souvent citée. La SCNF est un bon exemple d’entreprise qui va également au-delà de la diligence et de l’injonction de présence, quand elle a immédiatement proposé de rembourser intégralement des billets de trains en cas d’annulation et de prolonger les abonnements. 

Pour les marques qui relèvent de l’agrément et du plaisir, l’étude révèle que les Français attendaient d’elles qu’elles se sentent concernées et solidaires tout en adoptant un discours sobre. C’est IKEA qui dit « restez chez vous » ou encore Burger King qui prévient qu’un burger nous coutera 135€. En fait, le public attendait des comportements responsables et responsabilisant de la part des marques. Ce qu’Audi a par exemple très bien compris en séparant ses emblématiques quatre anneaux pour encourager à la distanciation sociale : « keep distance ».

 

Quelles sont les leçons à retenir ?

Premièrement, il faut communiquer de façon diligente : plus les marques ont réagi vite, plus elles ont été considérées comme honnêtes. Typiquement, LVMH qui dédie spontanément ses sites de production français de parfums et cosmétiques à la fabrication de gel hydroalcoolique. Le groupe n’ayant pas lancé de campagne de com, ce sont les journalistes qui ont relayé l’information. Les gens ont trouvé ça noble. A l’opposé les marques qui ont attendu pour adopter cette démarche altruiste ont été considérées comme opportunistes et marquetées.

Deuxièmement, les consommateurs ont apprécié les marques qui ont eu des discours congruents, c’est la continuité, c’est-à-dire les marques qui sont restées présentes dans une forme d’accompagnement et d’apaisement.

Troisièmement, il y a les pendants qui choquent comme la rupture et l’abandon : c’est La Poste qui ferme. Le mépris : c’est Comme j’aime qui explique qu’à être confiné autant en profiter pour mincir. Et enfin, les alarmistes comme les pastilles Drill qui proposent dès les petits symptômes de prendre leur pastille pour les maux de gorge. Cette com est perçue comme incongrue : on oublie ce qu’il se passe, ce que vous vivez et on ajoute de l’angoisse à l’angoisse.

En fait, l’immédiateté c’est un essentiel de la communication en tant de crise parce que ça dit au public : on a pensé à vous avant de penser à nous. Ensuite, si l’injonction de la transparence envers le client est de plus en plus plébiscitée, elle a pris tout son sens en mars dernier. Et puis la proximité, c’est important pour les Français d’entendre un discours d’union qui disait : on va se serrer les coudes, on se retrouvera. BMW a communiqué sur le fait qu’on reprendrait le plaisir de conduire plus tard.

 

Les tops et les flops de ce premier confinement selon toi et les consommateurs ?

On l’a vu c’est Décathlon qui a joué un rôle essentiel dans le domaine du sport avec des vidéos de coaching accessibles gratuitement en ligne sans tomber dans l’injonction de faire 100 abdos tous les matins. Il y a également les marques de luxe, qui restent dans leur posture de discrétion et s’emparent du rôle de mécène sans en faire du greenwashing. Les mutuelles aussi sont beaucoup ressorties dans l’étude. Elles ont su faire preuve d’empathie en baissant ou reportant les cotisations. Ça dit bien « Nous sommes là, nous ne servons à rien mais nous allons vous arranger parce que nous savons que c’est compliqué ». Les français ont appréciés aussi le fait que les marques s’adaptent à la situation et parlent de leur quotidien comme a pu le faire Free en relayant l’histoire des voisins qui faisaient connaissance depuis leur balcon.

Côté flop, on retrouve des marques comme Air France qui a mis trop de temps à communiquer sur le fait qu’ils allaient rembourser ou non les billets. Le PSG a été un exemple très cité en terme d’incongruence et pour cause. Ils ont créé une plateforme qui demandait aux supporters de faire des dons au personnel hospitalier. Un peu fort non quand on sait que leur chiffre d’affaires 2018/2019 annoncé juste avant s’élevait au chiffre record de 637,8 millions d’euros ?

Et puis il y a les média qui sont dans un entre deux. D’un côté, les Français ont apprécié leur posture de repère et d’informateur avec des conseils scientifiques pour expliquer et vulgariser. Et d’un autre côté, le décompte des morts et l’escalade des annonces anxiogènes ont beaucoup choqué été très critiqués.

 

Est-ce que ça préfigure la communication de demain ?

Cette matrice de marques s’est révélée être tout aussi opérationnelle lors du deuxième confinement. Elle nous a permis de monter une grille qui facilite l’analyse des campagnéens actuelles. Les tendances et valeurs repérées après le premier confinement sont toujours vérifiées : si la transparence est un code clé quelle que soit la période, la réactivité est un code de crise plus qu’un code corporate. On retient aussi qu’il faut rester fidèle à ses valeurs initiales. On a vu que les marques avec un ADN fort et des valeurs structurantes ont mieux survécu à ce type de crise qui bouscule les certitudes du consommateur.

Il a été également passionnant de constater que certaines marques qui étaient attendu comme acteurs ont effectivement agit mais ont aussi pris la parole. Cela a été bien reçu parce qu’elles l’ont fait sans communiquer sur elle-même, mais plutôt sur la situation, sur les Français et leur quotidien. L’empathie a joué un rôle essentiel, puisque ces marques devenaient des entités elles aussi confinées et bousculées par cette crise.  

Un dernier enseignement qu’il me semble important de rappeler aux marques, c’est le fait que la communication ce n’est pas de la manipulation, ou alors elle est consentie. Les consommateurs savent faire preuves de bons sens. Et cette période de jugement exacerbé constitue un moment propice pour les marques pour se poser des questions sur leur ligne de conduite.

 

 

Pour en savoir plus sur cette étude

Cabinet Adequation MR

https://www.adequation-mr.fr/

emc@adequation-mr.fr

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